CHAPITRE XXIV
Leia Organa Solo observait le chaos organisé qui régnait autour d’elle. Elle aurait préféré plus d’organisation et moins de chaos… Le Ralroost et une poignée de cargos étaient arrivés sur Dantooine, ne détectant aucun vaisseau yuuzhan vong dans le système. Les cargos et les navettes entreprirent de débarquer les réfugiés sur un continent équatorial relié par des bandes de terre au continent nord, plus grand, et au continent polaire.
Les cargos avaient embarqué plus de gens que leurs réserves leur permettraient de nourrir jusqu’au Noyau. Dantooine était une bonne destination pour quitter Dubrillion. La suite serait plus compliquée.
Leia soupira.
Si Tarkin avait mordu à l’hameçon, Dantooine aurait été détruite et nous n’aurions même pas eu ce havre.
Son comlink bipa.
– Ici Organa Solo…
– Votre Altesse, dit l’amiral Kre’fey, le dernier groupe de réfugiés vient de quitter le Ralroost. Je vous suggère de revenir à bord afin que nous partions pour le Noyau. Je sais que vous voulez rester, mais j’ai sur Coruscant des chefs à qui je dois rendre des comptes.
– Et vous pensez qu’ils apprécieront ma présence, quand je leur dirai que je les avais prévenus ? Non, merci, amiral ! Je resterai ici ! Envoyez-nous de l’aide, comme promis, et nous nous débrouillerons.
– Et si les Vong nous ont suivis ?
– Abandonner les réfugiés serait encore pire. Faites un bon voyage. Je suis sûre que le sénateur A’Kla vous sera d’un grand secours.
– Je n’en doute pas, s’il venait avec nous. Mais il pilote ma navette personnelle, avec à bord le dernier groupe de réfugiés. Je vous laisse deux compagnies d’infanterie et des armes.
– J’espère que nous n’en aurons pas besoin.
– Moi aussi !
– Bon voyage, amiral. Et que la Force soit avec vous.
– Je reviendrai le plus vite possible…
Leia ferma son comlink, puis sourit à Gavin Darklighter qui arrivait, Jaina sur les talons.
– Bonjour, colonel.
– Votre Altesse… J’ai pris la liberté de charger le membre le plus récent de mon équipe de la liaison entre les trois escadrons en poste ici et les autorités civiles. C’est-à-dire vous. (Gavin désigna le nord, le sud-ouest et le sud-est du camp.) J’ai disposé mes hommes pour former une sorte de périmètre de sécurité. Nos armes ne sont pas faites pour repousser des attaques au sol, mais nous nous débrouillerons. Les Rogues sont au nord, et deux escadrons d’Affreux se partagent le sud.
Leia hocha la tête. Le camp principal était installé dans une dépression, au cœur d’une grande vallée.
– Cet endroit n’a pas l’air très facile à défendre…
– C’est vrai, mais les détecteurs montrent qu’il y a des puits pour nous alimenter en eau. Les gens devront se construire des abris, car le mauvais temps arrive du nord. Nous leur ferons creuser des tranchées pour préparer une ligne de défense. Si les Vong sont là, nous en aurons besoin.
– Et s’ils n’y sont pas, les gens rouspéteront…
– Maman, ces malheureux sont terrifiés, dit Jaina. Leur faire creuser des tranchées leur changera les idées. Les cargos posés au milieu du camp serviront d’abris temporaires, et leurs canons vous protégeront si nous devons aller désintégrer quelques skips.
La façon dont Jaina prononça les mots désintégrer quelques skips fit frémir Leia et la poussa à regarder sa fille d’un œil nouveau.
Jaina avait un peu de poussière sur le visage, et les aisselles de sa combinaison étaient tachées de sueur. Ses cheveux tirés en arrière n’avaient pas le lustre d’une chevelure propre. Leia vit que sa fille était fatiguée, mais une flamme brûlait dans ses yeux, et elle la reconnut. Son père adoptif avait vu la même dans ses yeux quand elle s’était jointe à la Rébellion.
Jaina est plus adulte qu’une mère n’aime à le reconnaître…
Leia leva une main pour caresser la joue de sa fille, mais elle capta un éclair de méfiance dans ses yeux. Elle s’arrangea pour que sa main se pose sur l’épaule de son enfant.
– C’est un point important, Jaina, dit-elle.
Gavin acquiesça.
– Il nous faudra peut-être les déplacer un peu pour obtenir la meilleure couverture, mais ils devraient suffire à tenir des ennemis à l’écart.
– L’amiral Kre’fey nous envoie des troupes et quantité d’armes. Mais nous n’aurons pas le temps de former les réfugiés.
– Il doit y avoir parmi eux des vétérans de la Rébellion et de l’armée impériale, intervint Jaina. Il suffit de les regrouper pour qu’ils nous aident à organiser le camp et à renforcer ses défenses.
– Bonne idée. Les plantes du cru n’ont pas beaucoup de goût, mais il faudra bien s’en contenter. Il reste un sujet d’inquiétude.
– Lequel ? demanda Gavin.
– Mara et Anakin sont censés être sur Dantooine. Mais le balayage des fréquences de comlink n’a rien donné.
– Si elle là pour se reposer, ils n’ont peut-être pas activé leurs comlinks.
– J’y ai pensé. Hélas, je ne peux pas les atteindre à travers la Force. S’ils étaient morts, je l’aurais senti. Mais qu’ils soient coupés de tout comme ça… Ça n’est pas bon signe.
– Ne t’inquiète pas, maman. Mara est sacrement intelligente, et Anakin loin d’être idiot. Je suis sûre qu’ils vont bien.
– Tu sens leur présence ? demanda Leia.
– Un peu, et seulement par moments. Pas assez pour m’indiquer une direction, sinon je serais déjà partie à leur recherche. Mais je sens Anakin, un peu comme quand, enfants, on jouait à cache-cache. Lorsque je les reçois, ses ondes sont fortes.
– Espérons qu’il restera fort.
Surtout s’il joue à cache-cache avec les Yuuzhan Vong.
L’écho du coup de tonnerre mourut au moment où le guerrier yuuzhan vong lança son arme. Anakin entendit le bourdonnement et se jeta de côté. Le disque de la taille d’un poing frôla sa joue et se ficha dans le tronc d’un arbre.
Un éclair illumina l’arme vivante. Des pattes en sortirent et entreprirent de sortir l’insecte du trou qu’il avait percé dans le bois. Comme Anakin l’avait appris en fuyant les chasseurs yuuzhan vong, l’insecte se libérerait de l’écorce et retournerait vers le guerrier qui l’avait lancé.
Pas cette fois.
Anakin abattit son sabre laser sur l’insecte, le coupant en deux.
Puis il avança sur la piste de montagne qui correspondait au lit d’un petit ruisseau et vit bientôt Mara haletante, gisant dans la boue.
Sans un mot, il sortit de sa poche un morceau de racine de vincha, en coupa la moitié avec ses dents et fourra l’autre dans la bouche de Mara.
– Viens ! Ils sont juste derrière nous !
– Comme toujours. Sauf quand ils sont devant !
Elle essaya de se lever.
En vain.
Deux autres insectes-rasoirs se plantèrent devant eux. Anakin en écrasa un, puis tira par le bras Mara pour la remettre debout.
– Vite !
La jeune femme fit trois mètres, puis s’assit un instant sur un rocher avant de repartir. Il la suivit. Une fois au sommet de la pente, Anakin entendit des bruits de pas derrière lui.
Il pivota, sabre laser allumé, et para l’attaque du guerrier qui était sur ses talons. Il toucha le Yuuzhan Vong au ventre, mais son armure résista.
Le guerrier recula, puis abattit son bâton qui frappa le jeune homme à l’avant-bras gauche, déchirant sa manche et sa chair.
Le bâton redevint rigide. Le guerrier se dressa et dit quelque chose que le jeune homme ne comprit pas.
Le rocher où se tenait le Yuuzhan Vong roula sous lui, précipitant le guerrier à plat ventre. Au moment où il leva la tête, Anakin lui flanqua un coup de pied qui l’assomma.
Le jeune homme désactiva son sabre laser et courut rejoindre sa tante. Il essaya de la localiser avec la Force, mais elle l’avait tellement « enroulée » autour d’elle pour lutter contre sa maladie qu’il la détectait à peine.
Ils fuyaient les Yuuzhan Vong depuis trois jours. Remarquant des traces de leur passage en essayant de rallier leur vaisseau, ils avaient compris que l’ennemi l’avait découvert et probablement transformé en épave.
Pendant leur fuite, les conditions climatiques avaient été mauvaises. La pluie, soudaine, tombait avec tant de force qu’Anakin se demandait si les Yuuzhan Vong la contrôlaient, ou s’il devenait paranoïaque !
Les Vong qui les pourchassaient semblaient y prendre plaisir. Les insectes-rasoirs volaient autour d’eux, parfois très près. La tunique d’Anakin, dégoulinante de boue et de pluie, lui semblait davantage faite de trous que de tissu.
J’en suis réduit à compter sur mon corps et mon sabre laser…
La piste s’élargissait après le tournant. Des pierres dressées, semblables à des dents plantées le long du chemin, le conduisirent sous le couvert des arbres.
Mara, adossée à une stèle, sourit à Anakin. Même vêtue de lambeaux, couverte d’écorchures, fatiguée et malade, elle gardait une allure et une détermination de guerrière.
Elle regarda avec insistance derrière Anakin, qui se retourna… et vit trois guerriers yuuzhan vong.
Ils avançaient avec précaution… Pourquoi ?
N’importe lequel n’aurait aucun mal à me casser en deux.
Puis il comprit.
Ils sont là pour moi ! J’en ai tué deux et tous ceux que j’ai combattus ont été vaincus. Même si je ne les ai pas abattus, je les ai mortellement vexés.
Anakin parla sans se retourner.
– Mara, c’est après moi qu’ils en ont. Une question d’honneur, j’imagine.
– Peut-être, mais ils devront se battre contre nous deux !
Anakin entendit le sabre laser de Mara s’activer.
– Active ta lame, dit-elle. Je prends la gauche.
– Non, Mara. Pars !
Anakin était certain de ne pas survivre à un combat contre trois Yuuzhan Vong. Mais la Force était avec lui depuis sa première bataille.
Reste encore un peu avec moi, le temps que Mara s’échappe.
Il activa sa lame et la pointa vers le sol. Puis il avança la jambe droite, plia le genou, se campa sur ses pieds et fit un signe aux trois guerriers. Enfin, il releva sa lame de quelques centimètres, invitant celui du milieu à attaquer.
Le Yuuzhan Vong fit tourner son bâton au-dessus de sa tête. Anakin feinta, expédiant une motte de terre humide dans sa direction. Quand le guerrier recula d’un pas, ses camarades le huèrent.
Soudain, Anakin sut comment sauver Mara. Il visualisa mentalement la série de coups et de feintes nécessaires. Alors, il se lança corps et âme dans la chorégraphie écrite pour lui par la Force.
Il plongea vers le guerrier de droite et frappa. Pendant que le Vong tombait, il fila vers la gauche et se porta vers le guerrier du centre. Son mouvement ayant laissé son dos exposé, le guerrier de gauche en profita pour se jeter sur lui.
Mal lui en prit. Anakin inversa sa prise sur son sabre laser et, le faisant passer derrière sa hanche droite, embrocha le guerrier extragalactique.
L’armure du Yuuzhan Vong résista, lui évitant de se faire étriper, mais il se plia tout de même en deux. Anakin fit un saut périlleux puis lança une attaque qui frappa le guerrier du centre au niveau des cuisses. L’armure crépita et se craquela, mais elle empêcha le coup de sectionner les muscles et les os du Vong qui tomba sous la violence du choc.
Anakin lui flanqua un coup de pied à la tête qui n’empêcha pas le guerrier de se relever. Le Jedi battit en retraite vers la gauche et essaya de casser d’un autre coup de pied le bâton du Yuuzhan Vong. Mais l’arme, devenue souple, s’enroula autour de ses chevilles, le faisant tomber.
Anakin essaya de frapper le guerrier aux jambes. Mais celui-là sauta par-dessus sa lame et retomba lourdement, un pied sur la main droite d’Anakin. Le jeune homme entendit quelque chose craquer. Comme morte, sa main laissa échapper le sabre laser.
Le Yuuzhan Vong triompha. Son bâton grimpa le long de sa jambe, puis de son bras droit. Quand il se raidit, le guerrier le leva au-dessus de sa tête. Marmonnant des paroles solennelles, il l’abattit avec une force qui aurait ouvert Anakin du crâne au nombril.
Si le guerrier avait réussi…
La lame verte du sabre laser de Luke Skywalker dévia le bâton avant qu’il atteigne sa cible. Puis elle s’enfonça dans l’aisselle du guerrier, qui hurla et recula en titubant.
Sur sa gauche, Jacen Solo sauta d’une stèle et atterrit sur le guerrier yuuzhan vong. D’un coup de pied dans le dos, il le fit tomber à plat ventre et l’assomma du manche de son sabre laser. Puis il engagea le combat contre le dernier Vong qu’il ne tarda pas à embrocher.
Jacen aida son frère à se relever pendant que Luke courait rejoindre Mara. Anakin utilisa la Force pour récupérer son sabre laser. Puis il se baissa et le ramassa.
– Jacen, comment nous avez-vous dénichés ?
– Luke savait où et quand il vous trouverait. Une vision l’a conduit sur Dantooine. Nous ne pouvons pas repérer les Yuuzhan Vong à travers la Force, mais les animaux s’enfuient devant eux. Il nous a suffi de venir là où il n’y en avait plus.
– Oh. Je n’y aurais jamais pensé…
Jacen ébouriffa les cheveux trempés de son frère.
– Parce que tu n’es qu’un gamin !
– Ne te moque pas de lui, Jacen, dit Mara. S’il ne s’était pas occupé de moi, je serais morte.
Elle s’appuyait lourdement sur son époux. Anakin devina que Luke aurait aimé la soulever et la porter. Mais la jeune femme ne voulait rien entendre.
Luke regarda son plus jeune neveu avec respect.
– Je ne sais pas comment te remercier.
– J’ai une idée, dit Anakin. Ramène-nous sur Coruscant !
– Impossible, mais je vais te conduire à ta mère…
Anakin regarda ses robes déchirées et boueuses.
– Et moi qui croyais que tu voulais me remercier…
– Elle le fera aussi. Le vaisseau n’est pas très loin.
Mara embrassa Luke sur la joue.
– Au moins, nous quitterons Dantooine…, dit Mara.
– En réalité, non…
– Tu es venu à bord d’un vaisseau puissant, non ?
– Bien sûr. Mais nous ne pouvons pas quitter Dantooine. Leia et des réfugiés de Dubrillion ont atterri sur le continent sud-est. En arrivant dans le système, nous avons vu un vaisseau yuuzhan vong expédier sur la planète des transporteurs de troupes. Ils doivent trouver ce continent aussi hospitalier que Leia !
– Une vision t’a amené ici et c’est parfait ! dit Anakin. Sais-tu comment les choses tourneront au sud-est ?
– Comme le disait Yoda, l’avenir est sans cesse en mouvement. C’est tant mieux, parce que ma vision n’avait pas une fin heureuse.